A cet instant... L'éternité, l'esprit, l'âme... J'ai cru saisir où résidaient ces choses là... J'ai eu l'impression qu'on partageait tout de nos 13 ans de vie, et puis l'instant d'après... Une tristesse intolérable m'envahit. La chaleur d'Akari, son esprit... Que pouvais-je en faire ? Où les emporter ? Je l'ignorais complètement. J'ai réalisé clairement qu'on ne pourrait pas rester ensemble. Une vie écrasante et un temps infini s'étendaient devant nous. Pourtant, l'angoisse qui m'étreignait se mit à fondre doucement pour ne laisser que la douceur de la chaleur d'Akari.  

D'après ses lettres, j'imaginais toujours Akari seule... Le train resta encore arrêté deux heures au milieu de nulle part. Chaque minute semblait interminable. Le temps s'était dressé contre moi et s'écoulait lentement. J'ai serré les dents ne pouvant que retenir mes larmes, essayant de tenir bon. Akari... Dis-moi qu'au moins tu es rentrée chez toi...

Mentalement, on se ressemblait beaucoup avec Akari. Un an après mon arrivée à Tokyo, Akari fut transférée dans ma classe. Assez petits et souvent malades, on préférait la bibliothèque à la cours, ce qui nous avait rapprochés. D'ailleurs, les autres se moquaient parfois de nous. Mais bizarrement, à nous deux, ce genre de choses ne nous effrayait guère. Je croyais qu'on irait au même collège, qu'on serait toujours ensemble. Allez savoir pourquoi...

Mon cher Takaki Toono, pardonne-moi mon long silence. Ici aussi, l'été est chaud, mais moins qu'à Tokyo. En y repensant, j'aimais aussi les étés moites de Tokyo... L'asphalte semblant prêt à fondre, les gratte-ciel qui miroitent, la clim trop fraîche des magasins et du métro... On ne s'est pas vu depuis la remise des diplômes du primaire, il y a déjà 6 mois. Dis, Takaki, tu te souviens encore de moi ?

Allo.. Allo... Ici l'agent Blanc du Japon sur la planète Terre. Vous me recevez ? Rien à signaler ! C'est une planète très pacifique. Ici l'agent Blanc, je suis le gardien de la paix, je fais le maximum pour lutter contre les méchants, quel qu'ils soient. Terminé !

Comme c'est étrange, le feu, c'est un élément fascinant... En apparence, il a l'air tellement calme, tellement paisible. Mais de par sa nature, il est capable de rage et de destruction. Il donne l'impression de cacher quelque chose... En cela, il est semblable aux hommes. Parfois, il faut s'approcher d'eux pour voir ce qui se cache à l'intérieur de leurs êtres. Parfois, il faut se brûler cruellement pour découvrir la vérité et la regarder en face.

Noir... Quand le ciel devient sombre, tout sombre... Quand il fait nuit... Pourquoi je me sens triste ? Pourquoi j'ai le cafard ?

- Dis moi Blanc, je me demandais pourquoi tu ne me posais plus de questions sur Noir ? Tu ne te fais plus de soucis pour lui ?
- Il manque beaucoup de vis à Blanc.
- Il te manque des vis ?
- Des vis pour mon coeur, tu comprends ? Il est cassé, il faut le réparer... C'est Dieu qui m'a fait tout cassé.
- Tout cassé ?
- Tout cassé, oui ! Et Noir aussi, il l'a fait cassé. Il lui manque des vis aussi, des vis pour réparer son coeur.
- Tu crois vraiment que Dieu vous a fait tout cassé ?
- Ouais ! Mais moi j'ai toutes les vis pour bien réparer Noir, tu vois ? Toutes les vis, toutes les vis qu'il lui faut ! Toutes les vis !

- Je ne crois pas en Dieu... Mais... Je ne sais pas... J'ai souvent l'impression qu'il essaie de m'enlever Blanc... Tu vois ? Qu'il veut l'éloigner de moi...
- Ne t'inquiètes pas pour lui. Cet enfant est bien plus résistant que tu ne le crois. Quant à toi, tu es loin d'être aussi fort que tu l'imagines, c'est une chose qu'il te faut accepter. Voilà ce que mes yeux me disent, écoute-bien : ils me disent que c'est Blanc qui te protégeait. Qu'est-ce que tu en penses ? Ils ont tort mes yeux ? Enfin, quoi qu'il soit, moi je crois en toi, même si Dieu a l'air de regarder de l'autre côté...

- Est-ce qu'ils se servent d'un jeu pour converser avec leurs heptapodes ?

- Peut-être bien, pourquoi ?

- Et bien, disons que je leur apprenne les échecs au lieu de notre langue. Toutes nos conversations deviendraient une partie. Les idées s'exprimeraient à travers l'affrontement, la victoire, la défaite. Vous voyez le problème ? Si je me contentais de vous fournir un marteau...

- Tout deviendrait un clou.

- "Quel est votre but sur Terre ?" c'est là que vous voulez en venir, n'est-ce pas ?

- C'est la bonne question.

- OK. Bon. D'abord, il faut qu'on s'assure qu'ils comprennent ce qu'est une question. D'accord. La nature exacte d'une demande d'information, ainsi que sa réponse. Ensuite, il faut qu'on clarifie la différence de sens entre un vous singulier et un vous collectif. Parce que, on se fout de savoir pourquoi Joe l'extraterrestre est ici, on veut savoir pourquoi ils ont tous atterri. Et le mot but exige de connaître la notion d'intention. Nous devons découvrir si leurs actions obéissent à des choix conscients ou si leurs motivations sont si instinctives, que la seule notion de pourquoi aurait pour eux aucun sens. Et, avant toute chose, il faudrait que nous ayons assez de vocabulaire commun pour pouvoir comprendre leur réponse.

- J'ai toute une liste de questions qu'on pourrait passer en revue ensemble, en commençant par une poignée de main virtuelle de séquences binaires.

- J'aimerais mieux leur dire quelque chose avant de leur balancer des problèmes de maths.

Mais si il s'agit d'une forme de premier contact pacifique, pourquoi 12 vaisseaux ? Pourquoi pas un seul ?